Syracuse

En cette rentrée scolaire 2023, Samia Essabaa, professeure d'anglais au lycée professionnel Théodore Monod de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis), raconte son engagement pour ses élèves, à qui elle tente d'offrir chaque année des voyages scolaires instructifs, malgré leur situation de précarité. "Les cours théoriques entre quatre murs d'une classe ne suffisent pas. Ils ont besoin de sortir de leur quartier, de leur cité, pour voir le monde et, être cantonnés entre les murs de l'école ce n'est pas suffisant, et aussi pour que les cours soient plus concrets", raconte celle qui a embarqué ses élèves jusqu'à Tokyo, Cap Canaveral, ou Washington.

"J'ai des rêves pour mes gamins et je veux qu'ils vivent des expériences qui leur seraient inaccessibles en dehors de l'école de la République", assume-t-elle. "On demande à peu près 250 euros payables en dix fois, mais souvent les parents ne peuvent pas donc le fonds social contribue, les levées de fonds par le prof... Cette année, on est allés à San Francisco et certains n'ont payé que 20 euros." L'enseignante, qui a notamment fait visiter à ses élèves le Mémorial de la Shoah et le Musée national de l'histoire et de la culture afro-américaines de Washington, dit avoir eu le déclic après les attentats du 11-Septembre. "Deux trois, sur toute une classe, ont dit 'C'est bien fait pour les Juifs'. Ça m'a alerté parce que je me suis dit que je ne pouvais pas laisser passer ça, que je devais changer ma façon de voir les choses."

Abaya : "Tout dépend de l'intention qu'il y a derrière"

À propos de l'interdiction de l'abaya dans les établissements scolaires à partir de cette rentrée, Samia Essabaa juge que ce n'est pas le bon angle d'attaque. "Le terme ne me convient pas, nos jeunes filles portent des kimonos longs, des vestes longues, des robes longues. Et tout dépend de l'intention qu'il y a derrière", estime-t-elle. "Souvent, ce sont des jeunes filles qui portent ça parce qu'elles sont complexées, ne veulent pas qu'on voie leurs formes", ajoute l'enseignante. "Le discours des garçons est tranchant, difficile, et elles se préservent (et je les comprends) car quand j'entends les classes de garçons parler des filles, c'est horrible."

"Il faut être dans le dialogue et pas être dans la violence verbale", regrette-t-elle, "on est des éducateurs, des enseignants".