Dans un entretien au long cours au micro d'Arnaud Laporte, la pianiste Anne Queffélec nous fait entrer dans son univers artistique, riche d'influences musicales, littéraires et philosophiques, établi au cours d'une illustre carrière nationale et internationale. Revenant sur les étapes marquantes de son parcours personnel, elle se livre sur son rapport spirituel à la pratique musical.
Née à Paris le 17 janvier 1948, Anne Queffélec est la fille de l'écrivain Henri Queffélec et la soeur aînée de l'écrivain et marin Yann Queffélec. Formée au Conservatoire national supérieur de musique de Paris, elle y obtient deux premiers prix en piano (1965) et musique de chambre (1966). Son talent ainsi confirmé la convainc de poursuivre une carrière musicale plutôt que littéraire, bien que grande lectrice depuis le plus jeune âge, ayant évolué dans une maison où n'était pas de mur sans une bibliothèque bien fournie.
Les mots et les notes, la littérature et la musique, sont pour moi deux champs et parallèles et croisés. Le fait d'être assoiffée des grands textes nourrit la musicienne que je sus. C'est un double enrichissement, mais aussi une double frustration.
Anne Queffélec
La pianiste remporte très tôt plusieurs concours internationaux, sa carrière de concertiste à travers le monde se lance dès ses 20 ans et se conjuguera avec de multiples enregistrements pour le label Erato, qui établissent sa discographie autour de Chopin, Ravel, Schubert, Debussy et Erik Satie, auxquels la pianiste consacre plusieurs volumes d'oeuvres. Parallèlement à des tournées en solo ou avec des orchestres renommés, Anne Queffélec collabore en studio avec Pierre Amoyal, Frédéric Lodéon, Imogen Cooper, Catherine Collard ou Jean-Bernard Pommier, et travaille avec le réalisateur Milos Forman sur les parties de piano du film Amadeus, biopic romancé de Mozart.
Le moment du concert n'est jamais deux fois le même. Le public n'est pas passif, il envoie ses ondes. Je n'aime pas la notion de communication et de connexion : un concert, c'est de la communion, un autre partage en profondeur. Il y a dans le fait de se rassembler une forme de fraternité, ce rapprochement d'inconnus à travers la beauté. "Liberté, égalité, fraternité, beauté", ce serait pour moi la bonne devise de la France.
Anne Queffélec
Vedette régulière de festivals comme les Prom's de Londres, la Roque d'Anthéron ou la Folle Journée de Nantes, Anne Queffélec possède un répertoire éclectique comme en témoignent les recueils consacrés à Erik Satie (plusieurs volumes dont les Gymnopédies et Gnossiennes), Mozart (Fantaisies, Rondos...), Ravel (1998) mais aussi Scarlatti, Haydn, Beethoven (Lettre à Elise, 2005), Schubert, Chopin, Fauré et Bach (Contemplation, 2009). Outre les grandes scènes internationales, Anne Queffélec a également donné plusieurs concerts dans le milieu carcéral, à Nantes, Fleury-Mérogis et au Mans. Un rapport au partage de la musique qui incarne l'esprit de sa pratique, tournée vers la communion avec le public et la communication du beau.
Son actualité :
Son enregistrement de 1988 Satie: Gymnopédies, Gnossiennes & autres pièces a paru le 19 mars 2021 chez Warner en édition vinyle. Anne Queffélec a également signé la préface de la nouvelle édition de la biographie Mozart de Jean-Victor Hocquard, parue en janvier 2021 chez Points.
Merci à Mozart. Qu'est-ce qu'on ferait sans lui ? Comment, avant Mozart, se débrouillaient les êtres humains ? Je dis facilement que Mozart est l'homme de ma vie, car je pense qu'il était le plus grand connaisseur en amour qui soit.
Anne Queffélec
Sons diffusés pendant l'enregistrement :
- La fugue de la sonate n°31 de Beethoven, opus 110, interprétée par Alfred Brendel
- Anne Queffélec et son fils Gaspard Dehaene sur le disque _Contemplations : "_Sonatina de la Cantate - Actus Tragicus- en si bémol majeur, BWV 106
- Cosi fan tutte, de Mozart, avec les voix de Christa Ludwig et Gundula Janowitz
- Le discours d'Albert Camus pour la réception de son prix Nobel de littérature, en 1957
- Les propos de Vladimir Jankélévitch au sujet de la temporalité de la musique
- Erik Satie, Sports et divertissements : n°17 "Le Tango perpétuel", interprété par Anne Queffélec