À partir d’août 1918, une deuxième vague de grippe plus meurtrière survient ; l’épidémie s’aggrave. Les scientifiques se lancent alors dans une enquête épidémiologique afin d’identifier la cause des infections.
Le précurseur Paul A. Lewis
Vingt ans avant la grippe espagnole, le scientifique allemand Pfeiffer avait découvert la bactérie "bacillus influenzae", qu’il pense être à l’origine de la grippe. L'échec à isoler Bacillus influenzae chez certains patients est alors attribué à la difficulté de cultiver la bactérie. La communauté scientifique, qui ne connaît pas encore l'existence du virus, s'enlise dans cette mauvaise direction.
C’était sans compter sur les recherches menées par le brillant pathologiste américain Paul A. Lewis. Aidé par le vétérinaire Richard E. Shope dans les années 1920, il découvre le virus de la grippe chez le porc. Paul Lewis, isolé, peu reconnu, s'exile au Brésil pour travailler sur la fièvre jaune. Probable victime d'un incident de laboratoire, il meurt en 1929, avant d'avoir publié ses recherches novatrices. Leur article paraît en 1931 et ouvre la voie à de nouvelles recherches qui aboutiront à la découverte du virus de la grippe sur l'être humain.
Oswald Avery découvre le secret de la vie : l'ADN
Dans les années 1920, le débat fait rage sur l'agent pathogène de la grippe. À l'Institut Rockefeller à New York, les chercheurs se mobilisent, et notamment Oswald Avery, l'un des premiers biologistes moléculaires et pionnier de l'immunochimie.
Deux de ses collègues découvrent que les sécrétions nasales de patients infectés pouvaient provoquer une maladie dans les poumons de lapins après avoir été filtrées en excluant les bactéries. Mais d'autres chercheurs ne parviennent par à reproduire leurs résultats. Avery doute d'abord de leurs conclusions, et tente de prouver l'hypothèse fallacieuse de Bacillus influenzae. Dans ce but, il développe des milieux de culture améliorés pour la bactérie, qui ont été largement adoptés et ont réduit la possibilité de faux négatifs. Après l'épidémie de grippe, Avery reprend ses travaux sur le pneumocoque, fort de ses recherches sur la grippe. Il parvient à révéler que la substance qui peut transformer un type de pneumocoque en un autre est l'ADN.
Oswald Avery a ainsi trouvé le secret de l'hérédité, de la vie. Comble de l’ironie, il n'obtiendra pas le prix Nobel, car sa découverte est tellement révolutionnaire que le jury Nobel préfère laisser le temps de la réflexion.
Cette découverte majeure marque le début de la biologie moléculaire. Le temps que cette découverte soit acceptée par la communauté scientifique, Oswald Avery est mort, sans prix Nobel. Le virus de la grippe a été trouvé par des chemins détournés, mais cette quête a non seulement permis la découverte du secret de l’information génétique, mais aussi celle de la pénicilline par le médecin britannique Alexander Fleming.
Un podcast original en 4 épisodes, raconté par Renaud Piarroux, réalisé par Clément Nouguier. Conseillère au programme : Camille Renard. Mixage : Manuel Couturier. Documentaliste INA : Arnaud Plançon.
