De plus en plus de personnes mangent moins et moins bien. Et encore, le phénomène est probablement sous-estimé, car le nombre citoyen en situation d’insécurité alimentaire dépasse largement celui des seuls bénéficiaires de l’aide alimentaire. C’est plus dur à évaluer.
Après l'alerte des Restos du cœur, le gouvernement a lancé des appels à la générosité et les promesses de dons se sont multipliées. L'objectif, c'est de permettre aux associations de continuer à aider les personnes qui se tournent vers elles.
D'une façon générale, pour améliorer l'accès à l’alimentation, la réponse actuelle s’inscrit dans des politiques sociales, c'est-à-dire de soutien aux plus pauvres. Et elle repose sur la filière de l’aide alimentaire. Filière modernisée au fil des années, et soutenue. Que cela soit par la loi, à travers les mesures antigaspillage par exemple, ou comme maintenant, avec des appels aux dons. Est-ce suffisant face aux difficultés ? Et est-ce encore la bonne réponse ?
Vers une sécurité sociale de l'alimentation ?
Une autre idée, d’abord défendue par des militants puis explorée par des chercheurs, fait son chemin depuis une vingtaine d’années, celle d’un droit à l’alimentation. L’an dernier, le Conseil national de l’alimentation (CNA) lui-même, une instance consultative auprès des ministères concernés par le sujet, a proposé d'expérimenter la mise en place d’une sécurité sociale de l’alimentation. Un outil pour aller vers une “démocratie alimentaire".
Ce projet de "sécurité sociale de l'alimentation" a été développé il y a quelques années.
L'idée, en résumé, c'est que tout le monde ait un accès garanti à une alimentation choisie. Comment ? Via une carte, un peu comme la carte vitale, avec un crédit par mois et par personne, qui permettrait d’acheter des produits conventionnés. C’est vraiment un changement de logique, explique Dominique Paturel, chercheuse à l’Inrae, elle est spécialiste de ces questions de démocratie alimentaire.
Les choix des produits éligibles qui permettraient de réorienter les productions. Autrement dit, il s’agit penser ensemble le droit de tous à l'alimentation, mais aussi les transformations de la production agricole et les droits des paysans.
Depuis vingt ans, se développent les AMAP (des partenariats entre des groupes de consommateurs et de producteurs) ou encore les groupements d’achats. Cette année, à Montpellier, une "caisse alimentaire commune" a été lancée : 450 habitants cotisent selon leurs moyens... et reçoivent 100 euros par mois pour mieux manger. Il existe désormais des centaines d’initiatives de ce type.
Changer d’approche prendrait du temps. Mais après tout, la Sécurité sociale telle qu’on la connaît a été précédée par des décennies d’histoire des mutuelles.
La question du droit à l’alimentation est sans conteste vivement discuté dans la société civile ou le monde de la recherche. Mais elle n’a pas encore passé les portes de l’Assemblée nationale, ni fait l’objet d’un débat politique.
