Après une journée mondiale, le 10 octobre dernier, la santé mentale sera grande cause nationale en 2025 – en effet, le sujet a pris une place croissante dans nos préoccupations, en particulier depuis l’épidémie de Covid, et traverse de plus en plus largement les espaces médiatiques, les réseaux sociaux et les fictions.
Ce n’est pas la première fois que nous en parlons dans Être et savoir, les ados sont de plus en plus concernés/touchés par des problèmes psychologiques ou psychiatriques : selon l’indice de bien-être mental de l’OMS, seulement la moitié des élèves français interrogés pour une enquête de Santé publique France présentent un bon niveau de bien-être mental (59% chez les collégiens et 51% chez les lycéens). Alors, quelle vision du mal-être et des maladies mentales la culture contemporaine qui s’adresse aux jeunes véhicule-t-elle ? Nous allons en particulier parler de pop culture ; pensez à ces célébrités qui évoquent leurs troubles telles Selena Gomez, à des chansons comme celles de Zao de Sagazan, des fictions, et tout ce qui nous échappe encore davantage sur les réseaux sociaux.
Comment les jeunes reçoivent-ils ces messages ? Cela les aident-t-ils à mieux comprendre leurs éventuels symptômes, nous permettent-ils de mieux les accompagner alors que les personnels de santé sont loin d’être assez nombreux, à l’école pour commencer et, comment ignorer la gravité de la situation, dans nos hôpitaux.
Dans cette émission, vous entendrez également les voix de Laurence Mauvillain, infirmière scolaire en collège (académie de Bordeaux) et membre du syndicat SNES-FSU, et de Charles-Edouard Notredame, pédopsychiatre, maître de conférences-praticien hospitalier au CHU de Lille, co-créateur du podcast à destination des pédopsychiatres, "Tracer la voix".
Enfin, ce lundi 14 octobre, une minute de silence a été respectée dans les collèges et lycées en mémoire de Samuel Paty. En associant Etre et Savoir à cet hommage, nous prenons une minute pour annoncer la quatrième édition du Prix Samuel Paty le 19 octobre prochain ; ce prix est ouvert à tous les élèves du primaire et du secondaire. Le thème de l’année à venir, pour 2025, sera : "Comment règles et lois nous protègent-elles de l'injustice ?" Les inscriptions sont ouvertes jusqu'au 10 décembre sur le site de l'Association des Professeurs d'Histoire et de Géographie : www.aphg.fr. L'association souligne que la participation au concours renforce les liens entre les élèves et les enseignants, mais aussi parfois avec les surveillants, des CPE et même parfois des chefs d'établissements qui s'impliquent. Nous sommes certains qu’il en sera de même pour « Lire, penser, écrire – prix Dominique Bernard » lancé le 30 septembre par Isabelle Bernard à Arras afin de faire vivre les valeurs républicaines pour lesquelles son mari fut victime d'un assassinat terroriste, perpétré par un ancien élève. Ces valeurs sont « le respect de l’autre et de l’environnement, mais aussi la liberté de penser, l’esprit critique, la tolérance, le savoir et l’émancipation par la culture ». Un hommage et des valeurs que nous partageons. Nous pensons aussi ce soir à Agnès Lasalle ainsi qu’à Christine Renon.
Louise Tourret s'entretient avec ses invités : Jean-Victor Blanc, médecin psychiatre à l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP) et enseignant à Sorbonne Université, créateur du festival Pop et Psy , du compte instagram Culture Pop et Psy et auteur de Pop & psy : Comment la Pop culture nous aide à comprendre les troubles psychiques (Plon, 2019), Sophie Carquain, romancière et journaliste, autrice notamment de Hikikomorie – Dans le silence de ma chambre (Albin Michel jeunesse, 2024) et du récit Un papillon sur le bitume - En immersion dans un hôpital psy pour adolescents (Editions de l'Observatoire - Prix livre et droits humains 2024 de la ville de Nancy), et Laurence Corroy, professeure des universités en sciences de l'information et de la communication, spécialiste des consommations et pratiques médiatiques des jeunes, directrice adjointe du laboratoire CREM ( Centre de recherche sur les médiations) de l'Université de Lorraine, elle a co-dirigé l’ouvrage Teen Séries , à paraître en novembre chez Double ponctuation, et a dirigé Education aux médias en Europe, histoire, enjeux et perspectives (L’Harmattan, 2022).
Les citations
Laurence Corroy : "Aborder le suicide dans les séries, pourquoi pas, à condition qu'il n'ait pas lieu. C'est-à-dire que les séries pour ados doivent absolument présenter des fins heureuses, des scénarios gagnants. Ce qui ne veut pas dire que les protagonistes ne vont pas rencontrer des problèmes. Ce qui m'a beaucoup été dit par les ados, c'est que ce qu'ils aiment, c'est quand il y a tous ses ratés, tous ses tremblés, tous ses essais, et que leurs héros et héroïnes surmontent finalement les difficultés. Si on leur présente tout le temps des scénarios qui se terminent mal, comment peuvent-ils se construire de façon positive ?"
Jean-Victor Blanc : "Là où les réseaux sociaux sont très ambivalents, c'est qu'il y a évidemment des effets négatifs, mais si on parle autant de santé mentale aujourd'hui, c'est aussi grâce à eux. Il y a une question politique, c'est qu'aujourd'hui les réseaux sociaux sont très mal régulés, plusieurs études montrent que globalement la moitié des contenus sur la santé mentale sur les réseaux est erronée et ne repose pas sur des bases scientifiques, voire vont vers des dérives sectaires. Il y a un problème de régulation et de visibilité où les comptes plus sérieux ont du mal à émerger, et c'est une responsabilité des plateformes."
Pour aller plus loin
- Une épidémie de solitude se répand chez les jeunes, Le Monde du 08/10/2024
- Santé mentale : de jeunes psychiatres militent contre la stigmatisation, Le Monde du 10/10/2024
Illustrations sonores
- Extrait de la série Nos vies en l'air, diffusée sur France TV à partir du 25 octobre prochain
- Zao de Sagazan, La symphonie des éclairs (2023)