Podcast

Israël en route vers l’annexion de pans entiers de Cisjordanie

Pierre Haski
Diffusé le vendredi, 01 mai 2020 (3 min)


Le gouvernement d’union de Netanyahou et Gantz devrait passer les derniers obstacles juridiques avant de voir le jour et de passer à la partie explosive de son programme : l’annexion d’une partie de la Cisjordanie occupée, changeant la donne politique.


   
Provient de l'émission
Géopolitique

Au programme
  • Les gros titres de la presse israélienne sont consacrés au coronavirus, mais la pandémie a eu un effet politique inattendu : elle a sauvé Benyamin Netanyahou, et aura des conséquences considérables dans cette région oh combien sensible.

    Dans les prochains jours, Netanyahou devrait franchir les derniers obstacles juridiques lui permettant de rester premier ministre pour la cinquième fois, bien qu’il ait été mis en examen pour corruption. Et il le sera grâce à la volte-face de son adversaire de trois élections générales, l’ancien chef d’état-major Benny Gantz. A égalité, les deux hommes alterneront à la tête du gouvernement ; mais c’est Netanyahou qui assurera les premiers 18 mois, pour bien montrer que, dans les faits, rien ne change.

    Le principal effet collatéral de cette entente, jugée contre-nature il y a encore quelques semaines, se fera sentir chez ceux qui ne votaient pas : les Palestiniens de Cisjordanie occupée. Dans l’accord de partage du pouvoir, il est une clause explosive : l’annexion par Israël d’une partie de la Cisjordanie.

    En pleine campagne électorale, Netanyahou avait sorti cette carte maîtresse de l’annexion, pour attirer à lui les électeurs des colonies de Cisjordanie, votant généralement pour les partis religieux ou plus à droite encore que le Likoud. En promettant l’annexion, un tabou jusque-là, il a contraint Gantz à le suivre sur cette voie, en entourant la demande d’un langage plus « diplomatique ».

    A l’arrivée, c’est Netanyahou qui l’emporte dans l’accord, puisque Gantz sera juste consulté sur ce dossier, sans droit de véto. C’est Netanyahou, et lui seul, qui sera à la manœuvre.

    Sur le terrain, les territoires visés sont déjà occupés par des colonies israéliennes, certaines, en particulier dans la vallée du Jourdain, depuis plusieurs décennies. Mais il y a une énorme nuance entre une occupation et une annexion : le statut de ces territoires relève de la résolution 242 du Conseil de sécurité, et à ce titre, la puissance occupante n’a pas le droit de le modifier.

    Clairement, aujourd’hui, le rapport de force local et international est tel que l’État hébreu se moque bien des réactions de ceux qui ne manqueront pas de le critiquer, à commencer par les Européens. La Ligue arabe a dénoncé hier ce projet, mais Israël a tissé tant de liens dans le monde arabe, basés sur des intérêts stratégiques communs, que là encore, il peut l’ignorer.

    La marche vers l’annexion débutera le premier juillet, un calendrier serré car Netanyahou veut profiter de la présence de son ami Donald Trump à la Maison Blanche au moins jusqu’à l’élection de novembre. Trump, qui a déjà reconnu l’annexion du Golan syrien et déplacé son ambassade de Tel Aviv à Jérusalem, ne refusera rien à son allié israélien.

    Seuls ce qui reste de « colombes » en Israël, et paradoxalement dans l’armée et les services secrets, juge la démarche dangereuse. Et évidemment, les Palestiniens qui dénoncent une décision fermant la porte à tout règlement négocié. Mais le rapport de force, là encore n’est pas en leur faveur.

    La vraie question est donc plutôt celle du jour d’après. Une fois l’existence d’un État palestinien définitivement impossible, que se passe-t-il ? Un seul État au lieu de deux ? Ou une situation d’« apartheid », ce mot que de nombreux Israéliens eux-mêmes n’hésitent plus à employer. Le premier pas est facile, la suite beaucoup moins.

Illustration
Géopolitique
Copyright
  • Radio France
Collection

Consulter en ligne

Suggestions

Du même auteur

Podcast

Risque d’échec politique au Mali pour la France

Géopolitique

Pierre Haski
Diffusé le lundi, 03 janvier 2022  (Durée 3 min)

Contrairement au souhait de Paris et des pays de la région, la junte militaire malienne repousse le retour à la vie civile à 2026, et déploie des militaires russes, un double défi, neuf ans après le d...

Podcast

A la Maison Blanche, la paix très électorale d’Israël avec deux pays du Golfe

Géopolitique

Pierre Haski
Diffusé le mardi, 15 septembre 2020  (Durée 3 min)

La signature aujourd’hui à Washington des accords entre Israël, les Émirats arabes unis et Bahrein suscitent des réactions diverses, à la fois en raison de l’ombre de Donald Trump et de l’« oubli » de...

Podcast

Le coup d’éclat électoral de Netanyahou : la promesse d’annexion de territoires occupés

Géopolitique

Pierre Haski
Diffusé le mercredi, 11 septembre 2019  (Durée 3 min)

Au coude à coude avec l’opposition dans les sondages à une semaine des élections, le premier ministre israélien tend la main aux colons en promettant des annexions, en violation du droit international...

Podcast

La résurgence de Daech en Syrie : chronique d’un retour annoncé

Géopolitique

Pierre Haski
Diffusé le jeudi, 27 janvier 2022  (Durée 3 min)

Trois ans après la chute du Califat de Daech, une centaine de combattants de l’État islamique ont attaqué une prison tenue par les Kurdes dans le nord-est de la Syrie. Il a fallu six jours de combats ...

Podcast

Israël-Palestine : Netanyahou reste sourd aux appels au cessez-le-feu

Géopolitique

Pierre Haski
Diffusé le mercredi, 19 mai 2021  (Durée 3 min)

De Joe Biden à 26 des 27 pays de l’UE, les appels au cessez-le-feu se font entendre, mais Israël veut poursuivre son opération de destruction des moyens du Hamas, au risque de toucher aussi les popula...

Chargement des enrichissements...