"Stopper la violence, enrayer le chaos et rétablir l’ordre : ce sont nos tâches les plus urgentes à Hong-Kong pour l’instant", les mots de Xi Jinping dans son discours lors du 11e sommet des BRICS en novembre 2019.
Pour répondre à ces questions, Julie Gacon reçoit Sebastian Veg, directeur d’études à l’EHESS et historien, ainsi que Eric Florence, chercheur à l’université de Liège.
C’est une reprise en main en deux ans et en deux temps. Deux réformes institutionnelles ont contribué à remettre un peu plus Hong Kong dans le giron de Pékin malgré les garanties promises lors de la rétrocession en 1997. Il y a deux ans, en 2020, la loi sur la sécurité intérieure permettait aux autorités locales de contrôler et de punir la moindre opposition. Un an plus tard, en 2021, une réforme électorale réduisait le nombre de sièges élus au suffrage universel, au sein du Conseil législatif. De quoi achever d’enterrer la semi-autonomie et les libertés dont jouissent les 7 200 000 habitants de Hong Kong, et qui n’ont plus le droit ne serait-ce que de manifester, comme ils l’avaient fait par centaines de milliers en 2019, contre cette ingérence des autorités judiciaires chinoises dans les affaires de la cité-État.
Quelles manœuvres à la fois législatives, politiques et institutionnelles Pékin a-t-elle engagées pour mettre au pas Hong Kong ? La cité-État peut-elle croire à une résurgence du mouvement pro-démocratie ?
"Le mouvement de protestation de 2019 était lui-même une réponse à l'érosion progressive d'un certain nombre de normes mises en place à Hong-Kong depuis la rétrocession. On ne peut donc pas dire que la Loi de Sécurité Nationale est venue réprimer les excès du mouvement de 2019 car en réalité, elle s'inscrit dans la suite de toutes ces érosions des normes de la société hongkongaise", affirme Sebastian Veg.
"Aujourd'hui, les lignes rouges à ne pas dépasser sont particulièrement floues dans le système judiciaire hongkongais, ce qui est un élément nouveau à Hong Kong et caractéristique des régimes autoritaires", observe Eric Florence.
Deuxième partie : le focus du jour
Vers une "continentalisation" des universités de Hong Kong
Depuis des années, les autorités locales hongkongaises tentent d'imposer les normes et valeurs chinoises sur les bancs des facultés. Si cette offensive appuyée par Pékin a longtemps rencontré des résistances comme le montre cette manifestation contre l’instauration de cours en mandarin à l’université de Hong Kong Baptist en 2018, ces contestations ont quasiment disparu aujourd'hui. Entre résistance étouffée et nouveaux programmes "patriotiques", le milieu universitaire hongkongais est-il en train de perdre son indépendance, et avec elle le rayonnement international dont il jouissait ?
Avec Alessia Lefébure, sociologue et spécialiste des politiques publiques et des réformes des systèmes universitaires à travers le monde.
"Alors que dans la loi administrative hongkongaise qui régit Hong Kong depuis la rétrocession en 1997, il y avait bien un article 137 qui établissait la liberté académique, les institutions éducatives jouissaient d'autonomie et de liberté académique, la loi de sécurité nationale introduit un article qui dit que le gouvernement prône l'éducation à la sécurité nationale. Cette loi rend caduque la liberté académique puisqu'elle permet une ingérence du parti communiste chinois dans le champ éducatif", explique Alessia Lefébure.
Pour aller plus loin :
Alessia Lefébure est l'autrice d’un ouvrage consacré aux mutations de l’enseignement supérieur en Chine intitulé Les Mandarins 2.0. Une bureaucratie chinoise formée à l’américaine publié par les Presses de Sciences Po en 2020.
Références sonores
- Chine : l'UE dénonce le projet de réforme électorale à Hong-Kong (France24 - 05/03/21)
- Contestation à Hong-Kong : début du procès de 9 figures du combat prodémocratie (France24 - 16/02/21)
- Hong-Kong : il y a 25 ans, la rétrocession (TV5Monde Info - 30/06/22)
- Hong-Kong's election committee picks John Lee as city's next chief executive in one-man race (South China Morning Post - 08/05/22)
- Britain's new Hongkongers (BBC World service - 15/09/22)
Références musicales
Préparation de l'émission
Une émission préparée par Barthélémy Gaillard et Julie Ducos.