Si les faits sont avérés, cet épisode pourrait être le plus grand scandale connu par les institutions européennes depuis 1999. Une affaire de corruption avait à l'époque fait trembler la Commission dirigée par le luxembourgeois Jacques Santer et mené au renforcement des contrôles de l’Office européen de lutte contre la fraude. L’ONG Transparency International a souligné que l'UE devait « prendre des mesures urgentes pour entreprendre une réforme en profondeur de leurs systèmes d’éthique et d’intégrité ».
Le Qatar soupçonné d'avoir corrompu la démocratie européenne
« Ce scandale nous consterne » a déclaré la présidente du groupe S&D Iratxe Garcia Perez. La police belge a perquisitionné le 12 décembre les locaux du Parlement européen à Bruxelles dans le cadre d’une enquête sur des soupçons de corruption en lien avec le Qatar.
Au total, six personnes ont été interpellées, dont quatre ont été écrouées dans ce Qatargate. Parmi eux, la députée grecque au Parlement européen Eva Kaili, qui a été arrêtée vendredi par la police belge dans le cadre d'une "enquête majeure". Elle est soupçonnée de participation à une organisation de blanchiment d'argent et corruption en ayant accepté d'importantes sommes d'argent" et de faire du lobbying illicite en faveur d'un État du golfe Persique, que les médias belges ont identifié comme étant le Qatar, l'hôte controversé de la Coupe du monde de la FIFA 2022.
A ses côtés, Pier Antonio Panzeri a lui été inculpé pour « corruption, blanchiment et organisation criminelle ». Luca Visentini, directeur d'ONG et secrétaire général de la Confédération syndicale internationale, a également été arrêté vendredi. Enfin, Francesco Giorgi, le compagnon de la députée Eva Kaili, a reconnu faire partie d’un réseau d’influence au service du Qatar. L'ONG « Fight impunity » serait également concernée. « Du matériel informatique et des téléphones portables » ont notamment été saisis et feront rapidement l'objet d'analyses approfondies, a déclaré la police belge.
La régulation du lobbying au niveau de l’Union européenne
« Ces allégations sont extrêmement préoccupantes. C'est une question de confiance dans les personnes au cœur de nos institutions », a réagi la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen au sujet des arrestations. Les députés sont, en somme, accusés de céder au lobbying, qui est défini par le Parlement européen comme étant « toutes les activités menées dans le but d’influencer les politiques et les processus de décision des instruments de l’Union, quel que soit le lieu où elles sont réalisées et quel que soit le canal ou le mode de communication utilisé ».
Depuis juillet 2021, il existe une instance de régulation du lobbying au niveau européen. Il s’agit d'un registre de transparence de l’Union européenne, une base de données qui répertorie les organisations qui cherchent à influencer le processus législatif et de mise en œuvre des politiques européennes. 12 000 entités y sont actuellement recensées, mais l’inscription au registre est facultative. Si depuis 2011, les lobbies doivent s’enregistrer pour recevoir une carte qui leur permet d’accéder au bâtiment et doivent également accepter un code de bonne conduite qui leur interdit de verser certains cadeaux, les eurodéputés ne sont pas obligés de déclarer l’ensemble des lobbies qu’ils vont rencontrer, contrairement aux commissaires européens de groupe.